
La ligne de Luçon à l'Aiguillon sur Mer a une longueur de 22 Km. Ouverture le 10/08/1901.
En 1901, la ligne fut équipée de locomotive 030 T Decauville, de 13,5 à 15 ,5 tonnes à trois essieux, vitesse maximum 45 km/h.
A partir de 1934, elles furent remplacées par des 030T Corpet-Louvet de 15,8 tonnes à vide ( 22,36 tonnes en service) à trois essieux, vitesse maximum 50 km/h.
La lettre T indique qu'elle n'avait pas de tender indépendant. Le parc des voitures voyageurs se composait d'un modèle mixte 1er/2e classe nomenclaturées AB et d'un modèle 2éme classe , B. Elles étaient de type à deux essieux et plate-formes ouvertes. Des fourgons Df( f, avec frein), des wagons couverts G et Gf, des wagons plats N et Nf, et des wagons tombereaux H et Hf, complétaient le parc.
Entre Luçon et l'Aiguillon, la voie fut construite en accotement de la route, excepté de la Grand'Côte à St Michel en l'Herm et dans les villages.
Entre ces deux gares, outre les passagers, la ligne transportait au rythmes de trois allers-retours journaliers, des coquillages, du poisson, des pibales, des bestiaux et même des grenouilles. On chargeait aussi, dans un sens ou dans l’autre, des légumes (oignons, aulx, fèves …), le beurre de St Michel, des céréales, du bois, du charbon, des coquilles d'huîtres extraites aux Chaux destinées aux fours à chaux, du fumier, de la cendre de bouse utilisée comme engrais dans le bocage, du fourrage, de la paille.....
Le train chargeait aussi quantité de moules et huîtres.
Ref : Roger Eraud Petite histoire Baie de l'Aiguillon.
Sur le plan reproduit ci-après, et qui est extrait de la carte d’état-major autour de Luçon, on peut suivre le tracé des lignes de chemins de fer et des voies du tram. Les rails de ce dernier sont ici représentés par une ligne coupée de petits traits de chaque côté que l’on aperçoit tout juste quand ils se confondent avec la route ou les voies plus larges (SNCF). Les gares sont ici indiquées par « Station » ou « Ston ».
Extrait de la carte d’état-major de Luçon.
Le tracé de la ligne Montaigu / l’Aiguillon enveloppait le centre ville, par une large courbe à l’Est de ce dernier, pour se diriger vers le port. En effet, la ville de Luçon disposait encore au début du XXème siècle d’un port commercial relié à la mer par un canal de 14 kilomètres. Les grands trains de marchandises (sur les voies ordinaires) venaient au port pour y livrer ou y charger des marchandises. D’ailleurs sur la carte postale ci-dessous, à gauche, des wagons du grand train sont en stationnement devant les usines ou les entrepôts construits le long du quai à l’Est du bassin. Le plus intéressant sur ce cliché, au premier plan, ce sont les palettes de retournement qui permettaient manuellement de faire tourner la locomotive ou bien les wagons à 90 degrés (virage impossible) ou à 180 degrés (retour en arrière). On aperçoit également, tout à droite, des wagons du tram en stationnement sur l’autre quai à l’Ouest du canal. Et on peut suivre ses voies qui arrivaient du côté gauche, coupaient les rails du train et effectuaient une large courbe pour se diriger ensuite vers Triaize.
Les trains au port de Luçon.
Sur la carte postale ci-dessus on aperçoit, sur la gauche, le tram qui vient de la gare de Luçon et arrive sur le quai Ouest du port. Le convoi comporte la locomotive, le fourgon de marchandises, trois wagons tombereaux bâchés et trois voitures de voyageurs. Il semblerait que la locomotive soit une Decauville. A l’origine, la compagnie des tramways avait surtout commandé des machines de modèle Corpet-Louvet, qui étaient préférées du fait de leur robustesse et leur fiabilité.
Le tram arrive au port de Luçon.
Juste après les quais du canal se situait la deuxième station de tram de la ville: « Luçon-Port ». Sur la carte postale ci-dessus le tram quitte sa petite gare. Les voyageurs descendus sont encore sur le quai et regardent le photographe. Curieusement cette face plate avec deux lucarnes et deux lanternes constituait bien la partie avant du convoi. En effet la petite locomotive était toujours obligatoirement placée en tête du convoi mais elle se retrouvait dans le mauvais sens au redémarrage après un terminus. Nous avons d’ailleurs vu précédemment une locomotive identique dans la même position à la gare de Sainte-Hermine.
Le tram quitte la gare de Luçon-Port.
A partir de Luçon le petit train avait en outre une vocation touristique puisqu’il conduisait directement à la mer. Il participait ainsi pour les habitants du Sud et Centre Vendée aux mythiques « trains de plaisir ».
extrait de la carte Michelin de 1937.
Sept kilomètres après Luçon-Port, il arrivait à la gare du bourg de Triaize. Si des touristes, se penchant à la portière, qualifiaient la commune de « pays des ânes » (à cause de ses célèbres compétitions asines) ils se voyaient répliquer tout aussitôt par les autochtones « il en passe plus qu’il n’en reste ». Sur la carte postale ci-dessous, on aperçoit un certain nombre de gens en tenue de travail et avec des outils, sans doute pour charger dans les wagons. Dans l’embrasure du local pour la billetterie on reconnaît l’employée de la compagnie avec un tablier et surtout un brassard distinctif de couleur.
La gare de Triaize.
La gare de Saint-Michel-en-l’Herm, située exactement 7 kilomètres plus loin, avait au début du XXème siècle un certain dynamisme économique en raison de son importante laiterie, des activités annexes mais aussi de la carrière d’extraction de coquilles d’huîtres fossilisées. Sur cette carte postale, les bâtiments de la gare, en tous points identiques à ceux de Triaize, sont tout aussi modestes. Le convoi est en gare, les voyageurs descendent des wagons, les marchandises sont déchargées des wagons.
Après un petit parcours de cinq kilomètres seulement, le tram arrivait à la station de l’Aiguillon-Ville, située à la limite Est du bourg. Pourtant classés comme « halte » les bâtiments de la gare paraissaient plus importants et comprenaient en particulier un logement à l’étage. Deux trains semblent se croiser à ce moment là.
La halte de l’Aiguillon-Ville.
La commune de l’Aiguillon-sur-Mer comportait donc, elle aussi, deux gares, en particulier « L’Aiguillon-Port » le terminus de la ligne, situé le long du port, dans l’embouchure du fleuve « Le Lay ». C’était le point le plus proche de la mer. Aussi, les voyageurs désirant se rendre à la plage la plus proche devaient encore franchir le Lay par le pont passerelle, à pied, puis traverser le village de la Faute. Souvent, ils ne quittaient pas la gare avant d’avoir assisté à la manœuvre qui consistait, au terminus, à tourner la locomotive sur une palette et à la conduire à l’autre extrémité pour lui faire prendre la tête du convoi de retour. Nous avons la chance de bénéficier à cet endroit d’une carte postale représentant une vue latérale du convoi avant son départ (ci-dessous). De gauche à droite nous pouvons ainsi distinguer au moins deux wagons de voyageurs, le fourgon de marchandises avec le convoyeur et la locomotive (Decauville N°1) avec le mécanicien, la burette d’huile à la main. Cette ligne Luçon / l’Aiguillon a toujours été considérée comme la plus rentable du réseau en voyageurs comme en marchandises.
Le tram en gare de l’Aiguillon-Port.
Contrairement aux autres cartes postales précédentes, datant à peu près toutes de 1905 environ, cette photo, a été réalisée par Bergevin photographe à La Rochelle (avec le sigle Ramuntcho) vers 1920. On ne compte pas moins de 10 wagons de voyageurs dans ce convoi qui attend ici le départ en bordure du quai. Certains touristes montent déjà dans les wagons pour choisir leur place, d’autres flânent encore sur les pontons pour regarder les pêcheurs. C’est par cette ligne de tram que les bourriches d’huitres, les cageots de moules de l’Aiguillon et les autres fruits de la marée remontaient vers le haut bocage vendéen au début du XXème siècle (sans wagon frigorifique, mais avec un peu de glace).
Les voyageurs vont repartir du terminus.
Un voyageur qui partait de l’Aiguillon-sur-Mer le matin à 7 heures 12, arrivait à Luçon à 8 heures. Après 1 heure ¼ d’attente, il repartait à 9 heures 15 et arrivait à Chantonnay à 10 heures 20. Après 2 heures 40 d’attente, il repartait à 13 heures, arrivait Aux Quatre-Chemins à 13 heures 50, puis après 20 minutes d’attente, il repartait à 14 heures 10 pour arriver enfin (et en principe) à Montaigu à 15 heures 24.
Dans ces conditions, après la première guerre mondiale, le tram fut très vite largement concurrencé par les lignes d’autocar. Le trafic de voyageurs, étant désormais très peu rentable, le service fut interrompu à partir du 1er janvier 1935. Toutefois, il reprit en partie, pendant la durée de la seconde guerre mondiale. Le 1er janvier 1947 la ligne ferma définitivement de Chantonnay à Luçon. Et le dernier tronçon Luçon / l’Aiguillon réussit à se maintenir jusqu’au 31 novembre 1949.
Après cette date, les rails furent arrachés, les gares vendues et les petits trains disparurent définitivement du paysage de nos campagnes.
(Bibliographie : La Vendée des petits trains, 1987, Michel Harouy, Ed. Céromane).















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